Lorsqu’on débute tout juste la guitare et qu’on se retrouve bloqué avec sa guitare dans les mains, l’objectif consiste à remplacer ce silence assourdissant par un ensemble de notes musicalement harmonisées.
Puis à mesure que l’on progresse, on parvient à jouer de plus en plus de notes, d’une manière de plus en plus fluide.
C’est à partir de ce moment qu’il est temps de penser à jouer des silences.
Jouer des silences ?
« Qu’est-ce que ça veut dire ? Moi je pensais que c’était quand on ne jouait pas qu’il y avait des silences… »
Oui, c’est le cas, mais raisonner comme ça reviendrait à sous-estimer l’importance des silences.
Jouer un silence à bon escient demande une certaine maîtrise de son instrument.
Et surtout, il faut être capable de prendre du recul sur ce que l’on joue pour parvenir à estimer à quel moment un silence va donner de la valeur aux notes que vous venez de jouer.
Un orateur ne se juge pas au nombre de mots
Imaginez que vous écoutiez un orateur compétent parler, qu’il s’agisse d’un enseignant, d’un conférencier, d’un animateur ou simplement de quelqu’un qui raconte une histoire.
Si un orateur fait de longues phrases, qu’il a un discours bien ficelé et une syntaxe parfaite, et qu’il déclame son texte de manière énergique, il y a de fortes chances qu’il soit considéré comme un très bon orateur.
Maintenant si, au lieu de réciter un long texte, l’orateur se focalise sur quelques phrases clés susceptible de transmettre son message efficacement, et qu’il prend le temps de mettre l’accent sur chaque mot et de faire des pauses bien senties dans son discours, que va-t-il se passer ?
Plutôt que d’énoncer des faits en fournissant beaucoup de détails, il va utiliser une image simple et se servir des silences pour donner de l’importance à chaque mot de sa phrase.
Ainsi, il ne va pas parler à votre intellect, mais il va jouer sur vos émotions et vos sensations pour vous faire ressentir son discours.
Les 2 orateurs dans mon exemple auront transmis les mêmes informations, leur discours aura eu la même durée, mais il y a fort à parier que le discours du second vous aura beaucoup plus marqué et que vous n’oublierez pas le message qu’il a voulu vous transmettre.
Les silences musicaux
Dans la musique, le principe va être tout à fait similaire.
Si vous enchaînez les notes sans jamais vous arrêter, vous allez saouler votre auditoire encore plus vite que les profs d’histoire-géo, de maths ou de philosophie dont le discours ne vous passionnait pas.
Si vous enchaînez les notes, mais que vous laissez respirer vos phrases et vos rythmes, il est probable que vous auditeurs prendront beaucoup plus plaisir à vous écouter.
Maintenant, au lieu d’enchaîner les notes, tentez ceci :
- Ne jouez que les notes qui vous semblent absolument indispensables.
- Servez-vous des silences pour mettre en valeur ces notes.
- Créez des effets de suspense.
- Instaurez un effet de manque chez vos auditeurs qui deviennent impatients de découvrir la prochaine note.
Si vous parvenez à faire tout ça, vous réussirez à faire en sorte que vos auditeurs s’impliquent émotionnellement et vivent votre musique plutôt que de se contenter de l’écouter.
Stoppons le débat
Le message de cet article s’adresse à tous les musiciens, indépendamment du style, du niveau technique ou du tempo.
Le but n’est donc en aucun cas d’opposer les partisans des « 1000 notes à la minute » et les partisans des « 2 notes bien senties ».
Pour les « 1000 notes à la minute », peut être que s’arrêter à la 900ème suffira à créer la surprise et le silence va créer une attente et donner de l’intérêt à ce qui va suivre.
Pour les « 2 notes bien senties », il ne suffit pas de réduire le nombre de notes et d’augmenter le pourcentage de silences.
On ne fait pas une étude statistique ici.
Le but est d’utiliser les silences à bon escient et au bon moment, pour que les 2 notes en question soit vraiment mises en valeur.
Jouez des silences
Utiliser les silences est donc beaucoup plus difficile qu’on ne le pense généralement.
Il ne suffit pas de s’arrêter de jouer.
Il faut se servir du silence pour souligner la note précédente et pour rebondir sur la note suivante.
Tout ça demande donc pas mal de pratique et d’expérience, c’est pourquoi « jouer des silences » me semble être le terme le plus approprié.
Commentaires
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Bonjour Denis,
Jouer des silences, ça ne veut pas dire rallonger la durée d’un rythme.
On ne peut donc pas rajouter des silences dans un rythme, mais simplement remplacer certaines notes par des silences.
L’idée est simplement de faire respirer un peu plus ce que l’on joue plutôt que de se sentir obligé de remplir en permanence.
Pascal
Alut Pascal
encore moi. Désolé pour toutes mes questions mais tu m’as refilé ta maladie, bon ta passion.
Pas sûr d’avoir bien compris, par exemple, si je joue un rythme assez lourd (beaucoup de notes jouées) ex: oxoo oooo xxoo ooox par moment, dans le rythme, on rajoute des silences (x) ? C’est ça. ? Merci
Le parallèle avec un orateur est particulièrement pertinent, j’imagine que c’est aussi pour cela qu’on parle de phrasé en guitare. Laisser respirer entre les phrases donne de la valeur à chaque phrase. Je travaille sur ce point en ce moment (les silences de paire avec le doigté pour acquérir un meilleur filing) mais je sais d’ore et déjà que le problème sera de le retranscrire en concerts en compagnie de « mister Stress ». Je suis preneur de conseils et d’expérience guitaristique. Cordialement, Christophe
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